Mesdames, Messieurs,
Nous les membres de la « Mouvans Jénès » de l’ANG, âgés entre 16 et 40 ans, nous nous permettons de vous alerter sur les derniers événements qui agitent notre territoire depuis quelques jours.
En tout état de cause, cette crise sanitaire a amplifié un malaise déjà bien ancré dans la société guadeloupéenne. Nous pouvons facilement nous en rendre compte quand on porte attention aux discours venant des personnes présentes sur les différents barrages et ce, sans distinction de sexe, d’âge et de catégorie socio-professionnelle. La gestion inadaptée de la crise sanitaire par les services de l’état, le sentiment d’immobilisme des élus et / ou de la non prise en compte de leurs avis ont éveillé une colère latente explosant comme la soufrière en 1976. Mesdames, Messieurs les élu(e)s, nous symbolisons aussi cette population ayant le sentiment d’être écartée de toute considération visant à préserver les intérêts légitimes de la Guadeloupe.
Il est à noter que les guadeloupéens ont fait preuve d’une exemplarité sans faille malgré les tergiversations émanant de l’Etat en ce qui concerne l’obligation du port du masque, les conditions d’accessibilité au territoire, l’accompagnement des entreprises de la restauration et de l’événementiel. Force est de constater que la confiance envers vous les élus et l’État est aujourd’hui quasiment rompue. Le fort taux d’abstention aux dernières élections régionales et la défiance du couvre-feu instauré ces dernières heures, sont des éléments factuels qui sont là pour le rappeler.
Nous symbolisons aussi cette jeunesse débordante de vie et d’énergie, de volonté, de créativité et de compétences tout en ayant ce sentiment de révolte. Une jeunesse guadeloupéenne qu’elle soit salariée, fonctionnaire, entrepreneuse, étudiante ou sans emploi qui n’a jamais failli quand il a été question de démontrer son amour indéfectible pour son pays. Une jeunesse qui malheureusement, a le sentiment d’être galvaudée, utilisée, à travers des projets politiques dans lesquels elle n’est pas prise en considération. A ce titre, l’exode massif de cette force vive extraordinaire dans les pays européens, asiatiques et nord-américains en dit long.
Ainsi, le moment n’est-il pas venu de tous s’asseoir ensemble afin d’entamer un vrai dialogue constructif qui permettra d’entamer une vraie mutation de la société guadeloupéenne ?
Mesdames et Messieurs les élu(e)s, il n’est pas trop tard pour reprendre le contrôle de la situation sans le déploiement massif de militaires et de policiers.
À travers ces quelques lignes, nous mettons en alerte sur le fait que 12 ans après les évènements de 2009, la population, singulièrement la jeunesse de cet archipel exprime de nouveau sa colère et son désarroi à travers de tristes scènes au sein d’un projet sociétal dans lequel elle ne s’identifie pas ni ne s’y retrouve. Il semble de toute évidence qu’au-delà des revendications posées par les organisations syndicales concernant l’obligation vaccinale et le pass sanitaire, la Guadeloupe est à un tournant de son histoire. Visiblement, les politiques d’ajustement et le colmatage n’ont pas guéri les maux profonds d’une société marquée au fer rouge par 4 siècles d’esclavage colonial et un scandale sanitaire récent dans lequel l’État a une grande part de responsabilité. Visiblement, la départementalisation n’a pas dissipé cette quête identitaire et ce malgré l’amélioration des conditions de vie.
Nous avons tous une interrogation commune à travers ces tristes et malheureux évènements : quel est le projet guadeloupéen ?
Nous invitons tout le monde à se mettre ensemble autour d’une table afin d’entamer un nouveau chapitre crucial pour l’avenir de cet archipel dans son ensemble. Nous demandons donc clairement la possibilité d’avoir un vrai pouvoir local guadeloupéen prenant des décisions en fonction de la réalité géographique, culturel et historique du territoire. Ainsi, la consultation de la population par le biais d’un référendum sur l’évolution statutaire lors des prochaines échéances régionales nous paraît crucial.
Nous tenons à porter notre pierre à l’édifice et invitons les autres jeunes à s’investir dans ces futurs échanges qui impacteront l’avenir de cette Guadeloupe que nous aimerons jusqu’à notre dernier souffle.
Enfin, nos pensées se dirigent vers toutes celles et ceux qui ont perdu leurs proches, leur emploi et leur entreprise durant cette période pandémique que nous traversons.
« Dèmen solèy ké lévé »
Mouvans Jénès ANG