Mois : septembre 2023

Déclaration finale DÉCOLONISATION : RÉVOLUTION “TRANQUILLE”

Déclaration finale

DÉCOLONISATION : RÉVOLUTION “TRANQUILLE”

2eme édition organisée à New-York, 22 septembre 2023

Conformément à la décision prise lors de la 1ère table ronde de Bakou, le 6 juillet 2023, dans le cadre de la Réunion ministérielle du Bureau de coordination du Mouvement des Pays Non-Alignés (dont la République d’Azerbaïdjan assure la présidence) les parties prenantes se sont mises d’accord pour créer le Groupe d`Initiative de Bakou contre le colonialisme et ont exprimé leur volonté de poursuivre leur coopération.

Les participant.e.s à la table ronde de New-York saluent l’entrée en fonction du Groupe d’Initiative de Bakou et remercient le Groupe pour l’organisation de la 2éme édition de la table ronde, avec l’assistance de la Mission permanente de la République d’Azerbaïdjan auprès des Nations Unies, en sa qualité de Président du Bureau de coordination du Mouvement des Pays Non-Alignés.

Les représentant.e.s des mouvements anticolonialistes de Nouvelle-Calédonie, de Martinique, de Guyane, de Polynésie (Française), de Guadeloupe et le Groupe d’Initiative de Bakou réitèrent solennellement leur attachement aux principes fondamentaux du Mouvement des Non-Alignés et de la Charte des Nations Unies ainsi qu’aux résolutions pertinentes de celle-ci sur la décolonisation et soulignent l’urgence de l’achèvement du processus de décolonisation jusqu’à l’émancipation totale de tous les peuples sous domination coloniale.

Le soutien aux peuples qui luttent pour se libérer du joug colonial, sur la base des principes fondamentaux du droit international, constitue un devoir sacré du Mouvement des Non-alignés, la seconde plus grande organisation internationale après l’ONU.

La rencontre historique de nos organisations, ce 22 septembre 2023, à New-York, à l’occasion de la 78 e session de l’Assemblée Générale de l ́ONU, représente un acte politique majeur pour les peuples qui souffrent encore de la domination coloniale. Elle nous donne la précieuse opportunité de mettre en commun nos réflexions sur la façon de répondre, solidairement, aux défis multiples qui nous sont posés dans la lutte pour l’indépendance nationale de nos peuples et l’exigence incontournable des réparations légitimes pour les crimes humains, économiques, écologiques, culturels historiquement commis par la puissance coloniale française.

Les mouvements anticolonialistes de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie (française), de Martinique, de Guyane et de Guadeloupe, présents à New-York, lancent un appel pressant au monde ainsi qu’aux organisations internationales, y compris à l’ONU, au siège duquel ils sont présents aujourd’hui, pour porter leurs voix le plus haut possible, appuyer leurs efforts en vue de faire respecter leurs droits fondamentaux à la liberté, aux réparations-pilier essentiel de la décolonisation-et au développement, dans l’intérêt supérieur de leurs peuples.

Notamment, concernant le droit à l’autodétermination, nous soutenons fermement la décision du FLNKS de porter la contestation du 3eme référendum devant la Cour Internationale de Justice, afin que le processus de décolonisation engagé par l’Accord de Nouméa soit respecté.

Concernant la Guyane, la Martinique et la Guadeloupe, nous exigeons que ces pays soient réinscrits sur la liste de l’ONU des pays à décoloniser.

Concernant la Polynésie (Française), Maohi Nui, la France qui est rappelée à l’ordre par L’AG des Nations Unies chaque année pratique la politique de la chaise vide depuis la réinscription de Maohi Nui sur la liste des pays à décoloniser. Nous exigeons que la France s’assoie autour de la table des négociations pour démarrer enfin les négociations du processus de décolonisation comme l’exigent les résolutions de 2013, 2019, 2020, 2022.

Au moment où notre humanité est confrontée aux conséquences majeures du réchauffement climatique et à des menaces inédites qui engagent son futur, nos organisations déclarent solennellement que l’abolition totale du colonialisme et du néocolonialisme ainsi que la construction d’un monde nouveau fondé sur une Coopération Mondiale entre les Peuples, l’égalité, le respect mutuel et la souveraineté des peuples doivent fonder le socle des relations internationales dans le nouveau millénaire que nous construisons.

Le Groupe d’Initiative de Bakou et les organisations des dernières colonies françaises d’Amérique du Sud, des Caraïbes, de l’océan Indien et du Pacifique poursuivront leur travail afin de renforcer la nécessaire solidarité entre nos peuples et d’établir des relations de coopération avec le Mouvement des Pays Non-Alignés, le Comité Spécial de décolonisation et les autres instances de l’ONU. »

Signataires :

Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) Magalie Tingal

Mouvement des Jeunes Kanak en France (MJKF) Wea Kuanene Daniel

Parti pour la Libération de la Martinique (PALIMA) Francis Carole

Sylviane Curton

Mouvement des démocrates et des écologistes pour une Martinique souveraine (MODEMAS) Claudette Duhamel

Pour MAOHI NUI (Polynésie – Française) : TAVINI HUIRAATIRA

Ella Tokoragi
Leon Tefau
Maohi Protestant Church Révérent François Pihaatae

Mouvement de Décolonisation et d’Emancipation Sociale (MDES) Hector Pindard

Dominique Montet Servais Alphonsine

Alyans Nasyonal Gwadloup Nathalie Minatchy

Kolèktif Pou Sové Gwadloup René Beauchamp

Union Populaire pour la Libération de la Guadeloupe Jean-Jacob Bicep

Autres organisations représentées – FKNG ; CIPPA ; CIPN ; MIR

New-York
ONU
Le vendredi 22 septembre 2023

Allocution « Décolonisation : Révolution tranquille »

Monsieur le Directeur du Groupe d’initiative de Bakou,

Monsieur le modérateur,

Camarades de Kanaky, Polynésie, Martinique, Guyane,

Mesdames, Messieurs,

Je m’adresse à vous aujourd’hui au nom de plusieurs organisations patriotiques guadeloupéennes : le KSG, le FKNG, le MIR, le CIPN, le CIPPA et mon organisation l’ANG, réunies au sein du mouvement unitaire « Sanblé pou Nasyon Gwadloup » qui m’ont chargée d’un message commun pour la Guadeloupe.
Nous remercions le Groupe d’Initiative de Bakou d’avoir organisé cette conférence dans le cadre de la 4ème décennie pour la décolonisation. Ces décennies s’inscrivent dans la continuité de la déclaration de 1960 sur la décolonisation, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 1514.

C’est justement au cours de ces années 60 que naissent les mouvements contemporains de lutte contre le colonialisme français en Guadeloupe. Notre présence aujourd’hui ici permet de mettre en lumière les combats qui ont été menés depuis cette époque par bien des militants qui, petit à petit, sont en train de nous quitter mais qui éclairent encore notre lutte pour la décolonisation.

Cette lutte politique des années 60 a été brutalement stoppée par la répression lors des évènements de mai 1967 où les forces coloniales ont tiré sur des civils. Ces événements traumatisants dont le principal objectif était d’étouffer le mouvement patriotique, ont été qualifiés de massacre par la commission Stora, une commission nommée par l’Etat français en 2016. Selon cette commission “le massacre a eu lieu dans des conditions et d’une ampleur impossibles en France”. Si la départementalisation ne nous a pas protégés du massacre colonial, c’est certainement parce que cette départementalisation n’a pas été la fin de la colonie.

Que dénonçaient les anticolonialistes à l’époque ?
– La déportation des jeunes mise en place de manière officielle par un bureau des migrations, le BUMIDOM pendant que des français étaient encouragés à venir s’installer en Guadeloupe dans tous les secteurs administratifs avec des avantages conséquents. Ce que Aimé Cesaire a appelé le génocide par substitution.
– La surexploitation des travailleurs et la misère subie par la population.
– L’aliénation du colonisé si bien décrite par Fanon, qui est infériorisé et animalisé, qui a honte de lui-même, de sa couleur ou de ses origines et fait tout pour ressembler au colon, pour intégrer le monde du colon.
Malgré cette situation et la répression coloniale qui devait les terroriser, les travailleurs et la population vont s’organiser pour résister et revendiquer notamment avec de grandes grèves dans les années 1970. Puis de nombreux patriotes guadeloupéens ont risqué leur vie dans les années 80 pour défier le colonialisme sur le terrain de la lutte armée.

Plus de 60 ans après, qu’y a-t-il de changé ?

Le mouvement patriotique a ouvert la voie à la résistance sur le plan identitaire et culturel face à un colonialisme français centralisateur et assimilateur dans une république prétendument une et indivisible avec une seule langue, une seule culture. Les luttes menées ont heureusement permis de sauvegarder l’essentiel, l’âme du peuple Guadeloupéen, c’est-à-dire son identité culturelle, sa musique, sa langue qui sont autant de remparts contre la dépossession.

Cependant, sur les autres plans, la situation s’est aggravée
1. La disparition programmée du peuple guadeloupéen se confirme avec l’exode massif des jeunes en âge de procréer et la situation de précarité et de violence dans laquelle se trouvent ceux qui restent.

En effet, entre 2013 et 2018, la Guadeloupe a connu une diminution de la population de 0,7% par an. Il est attendu entre 2018 et 2070, une perte de 0,9 % par an.
Ainsi, de 388 000 habitants en 2018, nous passerions à 241 000 en 2070 soit une perte de 147 000 habitants en 52 ans. Cette diminution démographique engendre un vieillissement de la population : dans 7 ans, en 2030, un tiers de la population sera âgée de plus de 60 ans.

Concernant la violence, nous déplorons un niveau d’atteintes volontaires à l’intégrité physique une fois et demi supérieur au ratio français

2. Notre population diminue, mais en revanche, l’acquisition de terrains et l’installation de français et d’européens est rendue très facile par notre situation coloniale et notre appartenance à l’Europe, ce qui entraîne une disparition progressive et un renchérissement du foncier disponible pour l’installation des jeunes.

3. La situation de mal développement économique est caractérisée par la destruction du secteur productif et une dépendance structurelle aux importations.

Notre balance commerciale est déficitaire de plus de 2,8 milliards d’euros. Notre pays est devenu un territoire de consommation et un marché captif. Ainsi, quelques groupes sont en situation d’oligopole dans plusieurs secteurs d’activité. Deux d’entre eux pèsent énormément dans le portefeuille des Guadeloupéens et des Martiniquais : la grande distribution et l’ensemble du secteur de l’automobile, de la vente à la réparation en passant par la distribution des pièces détachées.

Cette situation de mal développement entraîne également une grande précarisation matérielle et sanitaire de la population. Le taux de chômage est de 18 % contre 7 % en France. Le chômage des jeunes est particulièrement inquiétant : 35% des 15 – 29 ans.12 % de la population est en situation de grande pauvreté.

Et les indicateurs sanitaires sont également préoccupants : 52 % de la population en situation de surpoids ou d’obésité, 25 % sont concernés par l’hypertension artérielle. L’empoisonnement des populations de Guadeloupe et de Martinique (plus de 90%) au chlordécone (un pesticide) avec la complicité de l’Etat français est une autre illustration de ce génocide programmé et de cette dépossession organisée (la prévalence des cancers de la prostate est double de celle de la France et une grande partie de nos sols sont pollués).

La Guadeloupe est un territoire insulaire, fragile avec un peuple constitué, une langue, une culture. Nous considérons que la Guadeloupe est une Nation. Cette Nation située à plus de 7 000 km de la France vit dans une situation de dépendance politique et économique vis-à-vis de la France, ce qui génère une grande vulnérabilité et nous coupe de notre espace économique, social et culturel naturel : La Caraïbe.

Dans le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies, l’article premier précise que :

1. Tous les peuples ont le droit de disposer d’eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.
2. Pour atteindre leurs fins, tous les peuples peuvent disposer librement de leurs richesses et de leurs ressources naturelles. En aucun cas, un peuple ne pourra être privé de ses propres moyens de subsistance.

La Guadeloupe dispose de richesses et de ressources naturelles, notamment une riche biodiversité, des ressources énergétiques comme la géothermie et des ressources maritimes. Nous sommes, parmi les dernières colonies françaises, celle qui bénéficie du plus grand linéaire côtier (plus de 620 km) ce qui nous confère une zone exclusive économique importante.

Tous ces atouts devraient pouvoir être exploités pour un développement socio-économique vertueux en faveur des enfants nés dans l’archipel, Un développement durable qui impose que les communautés gèrent leurs propres ressources, car les changements globaux auxquels nous sommes confrontés montrent les limites d’un monde globalisé.

Cela ne sera possible qu’en nous débarrassant de la tutelle coloniale et en instaurant de nouveaux rapports avec la France. Des rapports de nation souveraine ayant un pouvoir de décision politique permettant de protéger le peuple et la terre et maîtrisant son développement économique en coopération avec nos voisins de la Caraïbe.

En Guadeloupe, nous, organisations anticolonialistes, nous nous organisons, nous travaillons à construire notre nation avec nos ressources propres tout en nous inscrivant dans le combat pour les réparations. A l’extérieur, l’union des organisations des dernières colonies et le soutien international seront indispensables pour nous aider dans notre lutte contre le colonialisme. Les multiples soulèvements populaires de ces dernières années expriment une volonté d’un autre dessein. Volonté qui fait invariablement l’objet de répression et d’acharnement judiciaire de la part de la puissance coloniale.

La communauté internationale ne peut pas rester insensible à la disparition prévisible de notre peuple et à sa volonté d’épanouissement mise à mal par une puissance coloniale. Nous devons continuer à apporter notre contribution à la communauté humaine.

Nous comptons donc sur votre soutien pour nous aider à faire inscrire la Guadeloupe et les autres pays encore sous domination coloniale française sur la liste des pays à décoloniser comme le sont Montserrat, Anguilla, les îles vierges britanniques qui sont nos voisins immédiats et qui ont connu la même construction historique que nous.

 

Nou vlé pa disparèt,
Nou ka goumé a kaz an nou
Nou ka mandé zót ban nou on pal. Vive la solidarité internationale !

 

22 septembre 2023
New York
Nathalie MINATCHY (ANG)

 

À PROPOS

L’Alyans Nasyonal Gwadloup est un mouvement politique ET citoyen, regroupant à la fois des autonomistes et des indépendantistes, tous unis sous la bannière du nationalisme.

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